Les relations entre prisonniers

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Le Tuyau nous permet de mieux comprendre, par certains articles, comment se vivait la captivité et les problèmes qu'elle engendre. Qui faisait la cuisine?

"Ah ! Elles sont bien drôles nos petites familles et comme elles ressemblent peu à celles que nous avons là-bas en France. Elles sont généralement à deux ou trois personnes, rarement à quatre. Dans chacune il y a la femme. On choisit pour cela la plupart du temps un camarade débrouillard et débarré, qui s’entend à merveille à allumer du feu, à ouvrir les boîtes de conserves, à faire du bon café, de bonne soupe, qui excelle grâce à son audace, à obtenir du (censure), qui connaît les bons endroits, qui sait ou trouver du bois, du sel, de l’huile, en un mot c’est un "Démerdard"; il sait aussi ne jamais aller en corvée et grâce à lui le dîner est prêt, la cuisine est bonne. C'est lui qui s'occupe des colis, il sait ce qu'il manque et ce qu'il y a de trop, ce qui est bon et ce qui est mauvais. C'est le ministre de l'intérieur. Les autres camarades ce sont les maris, ils ne s'occupent de rien; quand ils arrivent du travail, c'est pour se mettre à table et dire si tout est à leur goût, puis ils mangent tout leur saoul et après cela ils allument un cigare en laissant à Madame le soin de leur servir un délicieux moka¹."

Des relations d'amitié sont nées en captivité comme celle entre Marcel RIEGEL, Florent AUFSCHNEIFER et Louis PALPIED. "Palpied, Aufschneider et moi avons choisi un coin au fond de la baraque du côté opposé à la porte d'entrée où nous y serons très bien. À partir de ce moment, nous décidons tous les trois de coucher ensemble ainsi que de faire une communauté de tous nos paquets pour vivre comme trois frères partageant ensemble nos joies et nos misères quand les unes ou les autres arrivaient²."

Les relations entre prisonniers français et prisonniers russes

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A partir du 9 janvier 1915, il est décidé de mélanger les nationalités dans les baraques. Il y a une majorité de russes dans le camp, c'est donc bien logiquement qu'on les retrouve, suite à cette décision, avec les français.

"Au matin du 9 Janvier, nous étions avisés qu’à partir du lendemain les baraques devraient contenir 144 hommes dont la moitié de Russes occupant une travée et une moitié de Français pour l’autre travée. (...)
Nous n’aimions pas les Russes, non pas que c’étaient de mauvais garçons, non, ils étaient doux, trop doux même, mais à cause du manque de propreté et d’hygiène pour lesquels il faut reconnaître, ils n’avaient aucun goût. Malheureusement nous fûmes dans l’obligation de les accepter. La propreté de la baraque s’en ressentit aussitôt et les poux devinrent de plus en plus nombreux²."

Les prisonniers russes étant délaissés par leur gouvernement (ils ne reçoivent pas de colis de nourriture), il arrive parfois que d'autre prisonniers voient leurs économies disparaître, ce qui n'arrange pas beaucoup leurs relations. "Cette joie de faire un bon petit goûter fut assombrie par la perte dans la baraque de mon porte-monnaie contenant une dizaine de marks. Un Russe l’avait obligeamment ramassé, sans toutefois le restituer²."

Sources

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¹Extrait du "Tuyau" n°2, p. 3, 15 juillet 1915.

² Extrait des souvenirs de guerre de Marcel RIEGEL.